Une poupée sur une boîte aux lettres (Marc Lagneau/Flickr/CC)
Ulrich et Gabrielle habitent une ferme perdue dans les collines de l'Ariège. Pour éviter de se déplacer jusqu'à la boîte postale la
plus proche, à 5 km, ils ont trouvé l'astuce :
« Nous accrochons une pince à linge au clapet de notre boîte aux lettres, avec le courrier à l'intérieur. C'est une sorte de code :
quand le facteur passe pour sa tournée quotidienne, il sait qu'il a une lettre à ramasser. Parfois, on laisse un peu de monnaie dans la boîte et c'est lui qui pose le timbre. »
La Poste, après avoir fermé ses bureaux de poste dans les campagnes, y fait disparaître les boîtes postales. Dans certains hameaux
isolés, adieu les sorties pour mettre le courrier dans la boîte jaune de la place du village.
« C'est la rentabilité avant tout »
Jacques Drouhin, maire de Flagy et président de l'Association des maires ruraux de Seine-et-Marne, tente de voir le bon côté des choses :
« Heureusement, il existe encore un esprit d'entraide dans les villages. Pour aller poster le courrier, on peut encore compter sur
son voisin ou sur la secrétaire de mairie ! »
Mais il dénonce « une véritable dégradation du service public dans le milieu rural » :
« Mauvaise distribution du courrier, moins de boîtes aux lettres, fin des cabines téléphoniques... c'est la rentabilité avant tout.
Conséquence : les habitants se retournent vers le maire qui doit trouver des solutions. »
La Poste nie vouloir supprimer les boîtes aux lettres, et parle d'un « redéploiement » :
« Nous mettons les boîtes aux lettres là où les gens en ont l'utilité. Le chiffre de 130 000 boîtes postales en France reste
stable. On a environ une boîte pour 500 habitants, c'est le ratio le plus élevé d'Europe. Alors quand on constate que la boîte n'est pas suffisamment remplie, nous décidons de la supprimer.
»
L'entreprise de service public explique que la décision de suppression d'une boîte se fait dans les bureaux de poste, après «
plusieurs instances de concertations entre La Poste et les élus locaux ».
La Poste faut sauter les boîtes, on attend le facteur
Une affirmation contestée par plusieurs élus. A Villeneuve-le-Comte, un village de Seine-et-Marne, la boîte aux lettres a été
retirée sans aucune concertation avec la commune.
Les arguments avancés au maire sont confus : d'abord, la boîte est dite en « réparation », puis, contactée par la mairie, La Poste
évoque un « risque routier » à l'endroit où elle est implantée, avant d'expliquer que la boîte n'était « pas rentable ». Le courrier se conclut par une phrase digne d'une entreprise privée
:
« En tant qu'entreprise responsable, La Poste se devait de maintenir une rentabilité économique afin de conserver son modèle social
et la pérennité de son activité. »
Pourtant, la loi française rend
obligatoire l'implantation d'une boîte aux lettres à moins de dix kilomètres de toute habitation. Les personnes âgées et à mobilité réduite seront-elles obligées de parcourir plusieurs kilomètres
pour poster leur déclaration d'impôts ? Au service communication de La Poste, on a une parade :
« Les habitants isolés des zones rurales pourront toujours donner leur courrier au facteur, lors de sa distribution. »
Autrement dit : si vous n'avez rien à faire de votre journée, attendez le passage du facteur...
Florent Hayet
Source : http://www.rue89.com/rue89-eco/