Bercy et la Banque de France sont à la manœuvre pour
organiser le sauvetage du Crédit immobilier de France (CIF) et l'une des options envisagées consisterait à l'adosser à La Banque Postale. Selon nos sources, la filiale de La Poste
a été invitée à examiner le dossier, vendredi 11 mai, par les
pouvoirs publics.
Trois jours après la mise au jour de graves difficultés de financement au sein de cet établissement de crédit immobilier proche du mouvement HLM,
le directeur du Trésor, Ramon Fernandez, et le gouverneur de la Banque de
France, Christian Noyer, ont pris les choses en main.
Dans un contexte de marchés extrêmement tendu, il s'agit, pour eux, de circonscrire rapidement le risque représenté par le CIF, qui,
s'il ne détient pas de dépôts, totalise 33 milliards d'euros de crédits immobiliers à long terme.
DÉPENDANCE
L'Autorité des marchés financiers (AMF) a suspendu
la cotation des obligations qu'émet le CIF pour se financer
depuis mardi 8 mai.
Interrogée, la Banque de France confirme qu'elle travaille sur le sujet : "Nous travaillons à des solutions
pérennes, en étroite concertation avec les pouvoirs publics", explique un porte-parole.
L'idée des autorités de tutelle et de contrôle du secteur financier est d'adosser le groupe CIF, un ensemble complexe d'établissements
coopératifs régionaux, à un groupe bancaire solide et doté d'une importante base de dépôts.
De fait, toutes les difficultés du CIF sont liées à son modèle économique, qui le rend totalement dépendant des marchés financiers. Ne collectant
pas de dépôts, le CIF doit en effet trouver l'intégralité de
ses financements sur le marché, pour prêter à ses clients.
Là réside toute la fragilité d'un groupe qui n'a, par ailleurs, aucun problème de fonds propres et affiche même un ratio de fonds propres élevé,
de 14 %.
Qu'une crise de liquidités survienne, comme c'est aujourd'hui le cas, et c'est la panne sèche. Les difficultés actuelles du CIF sont directement
liées à la menace d'une prochaine dégradation de sa note financière, que fait planer sur lui, depuis le 16 février, l'agence Moody's.
Cette épée de Damoclès sur l'avenir du CIF a conduit les commissaires aux comptes à refuser de certifier les
comptes, considérant que la continuité d'exploitation du CIF n'était pas assurée.
Le CIF a averti l'AMF de ce blocage le 8 mai, conduisant cette dernière à stopper la cotation des obligations émises par le groupe, dans
l'attente d'un communiqué de la société. Ce communiqué ne lui est toujours pas parvenu.
RENFORCEMENT DES FONDS PROPRES
Pour la Banque de France, le dossier du CIF est parfaitement connu. L'Autorité de contrôle prudentiel (ACP), que préside M. Noyer, n'a en effet cessé de demander au CIF de renforcer ses fonds propres, depuis 2008, pour sécuriser le groupe,
en dépit de la résistance farouche du président du CIF, Claude Sadoun. L'ACP est donc en mesure d'intervenir rapidement.
Le ministère des finances connaît lui aussi très bien le dossier, ayant tenté de pousser l'option d'un adossement de la banque au cours des dernières
années.
Il reste que les autorités de tutelle n'ont pas beaucoup de chemins possibles. Les portes semblent fermées du côté de BPCE, opposé à une reprise
du CIF, et du Crédit agricole, aux prises avec la crise grecque. Demeure la piste de l'adossement à La Banque postale, autre option qui fait sens.
Dans l'attente, le refinancement du CIF pourra être assuré par la Banque de France.
Anne Michel
Source : Le Monde.fr Publié 11.05.2012